Joseph Claude COMMUNAL

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Second et dernier enfant de la famille, il naît au Cluel le mardi 2 juin 1896 à 5 h du soir de Jean Marie Joseph et d’Anne DUTOUR, mariés à Echandelys le 13 août 1890. Son père, également né au Cluel le 12 septembre 1862 est l’aîné d’une famille de 9 enfants dont deux, Antoine Maurice né le 16 septembre 1871 et Jean né le 8 juillet 1876 seront également soldats pendant la Première Guerre Mondiale. Il aura de plus 4 cousins germains dont un par alliance (Jean Alexis DUTOUR, Claude Léon Joseph DUTOUR (qui va y mourir en 1917 à Verdun), Joseph Maurice DUTOUR et Jean Marie Maurice FAYOLLE, mari de sa cousine Marie Thérèse DUTOUR) qui seront également soldats pendant cette guerre. Son beau-frère Jean Marie MERLE, le mari de sa sœur aînée Anne Marie, exerçant le métier de repasseuse, née le premier juin 1892 au Cluel, y participera également (sergent des réserves, il sera blessé à 2 reprises et restera mobilisé pendant toute la durée du conflit).
Joseph Claude est agriculteur lors de sa visite d’incorporation. Il habite chez ses parents au Cluel. Mesurant 1 m 66, ses cheveux sont châtain foncé et ses yeux gris verdâtre. Il a un visage allongé, avec un front large et des oreilles qualifiées de « grandes ». Il est incorporé dès le 9 avril 1915 au 121e RI de Montluçon. La situation familiale est alors difficile :

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En raison de la période classes nécessaire à son apprentissage militaire, il n’a certainement pas du monter en ligne avant début octobre 1915. Son régiment tient alors la lisière du bois des Loges (région de Montdidier). Le secteur est calme, agréable et boisé. Début novembre, il glisse sur sa gauche et occupe la zone de Dancourt et Popincourt. C’est une plaine monotone dont le sol croule à la moindre averse, se transformant en mortier visqueux qui colle aux semelles. Il est impossible de circuler de jour en dehors des boyaux qu’il faut quotidiennement remettre en état.

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Début décembre 1915, le régiment est relevé et Joseph Claude est alors affecté au 105e RI. Il y retrouve Ambroise Jean Albert DUTOUR, du Cluel mais expatrié avant la guerre dans la région d’Amiens et de Péronne. Son nouveau régiment débute son entraînement au camp de Crévecoeur où il étudie les nouvelles méthodes offensives. Mais en février 1916, les Allemands décident de saigner les forces de l’armée française en attaquant à Verdun. Après quelques jours de marche, le régiment est transporté en chemin de fer et se trouve rassemblé le 29 février dans la forêt de Hesse, près de la ferme de Verrières. Il bivouaque, à peine abrité de la neige par des huttes de branchage construites à la hâte. Le bombardement gronde jour et nuit. Du 8 au 20 mars 1916, le premier bataillon et une compagnie occupent les ouvrages de la cote 310 et se tiennent en liaison avec les unités sur le Mort-Homme. Ils organisent le secteur, creusant le sol, tendant des fils de fer barbelé sous les violents bombardements. Le 21 mars 1916, il est relevé et occupe le lendemain les ouvrages du sud-ouest d’Haucourt. Il subit une violente attaque pendant la relève et les unités qui défendent les ouvrages Vaucluse et Martin résistent , puis totalement submergés, complètement cernés et à cours de munitions succombent. Le 20 mars, les 2e et 3e bataillons contre-attaque sur le bois d’Avocourt que les Allemands viennent d’enlever. Au soir, une partie du bois est reprise. Les pertes sont sérieuses sur les deux fronts et le 26 mars, le régiment est embarqué en camions pour Estrées-Saint-Denis où il se reconstitue.
A partir du 25 avril 1916, il remonte en ligne dans l’Oise, à Tracy-le-Val. C’est une guerre de tranchées particulièrement pénible en raison de la proximité des ouvrages allemands. Les torpilles bouleversent quotidiennement boyaux et parallèles et les grenades font régulièrement des victimes.

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Le 7 mai 1916, Joseph Claude est transféré au 30e RI. C’est le retour dans l’enfer de Verdun. Le jour même, le régiment remonte en ligne dans le bois des Caurettes et d’Haudiomont, ainsi qu’au ravin de la Dame. Les 11, 12 et 13 mai, de petites attaques sont réalisées afin de desserrer l’étau des Allemands qui essaient de monter la pente sud du ravin de la Dame, prenant de flanc le 2e bataillon. L’a-pic du ravin a rendu presque impossible la préparation d’artillerie et les victimes sont nombreuses. Le régiment est alors relevé le 15 mai et quitte Verdun. Il part au repos à Longeville et à Savonière où les rejoignent les renforts de la classe 1916. Il y reste une vingtaine de jours, permettant à de nombreux soldats de partie en permission. Le 8 juin, il part en camions pour Ancemont où 2 bataillons logent dans des péniches sur le canal. Puis, pendant 3 semaines, il exécute des travaux vers la batterie du Mardi-Gras et dans le ravin d’Eix. Début juillet 1916, il monte en ligne dans le secteur de la Woëvre. Jusqu’au 24 octobre, alternant 8 jours en ligne et 8 jours de repos, il est dans le secteur de la Lauffée et d’Eix et glisse progressivement à gauche.

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Il y prépare le terrain en vue de l’attaque du 24 octobre. Dans la nuit du 23 au 24 octobre, le 1er bataillon monte en ligne avec 4 jours de vivres. L’assaut est donné au lever du jour, couvert par un brouillard assez dense. La batterie de Damloup se défend quelque temps, puis est enlevée par la 3e compagnie qui y fait de nombreux prisonniers. Les soldats essayent d’organiser rapidement le terrain conquis.

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Si les pertes du régiment ont été légères pendant l’attaque, les contre-attaques allemandes et le violent bombardement qui suit deviennent meurtriers, les hommes n’ayant pas d’abri. Le 1er novembre 1916, le 30e RI est relevé et revient au repos à Ancemont. Il y reçoit des renforts du dépôt divisionnaire. Dès le 15 novembre, il remonte en ligne dans le secteur du bois du Chena-Montricelle, qu nord d’Haudiomont, beaucoup plus calme que le le secteur de la Laufée. Le 29 décembre 1916, le régiment quitte Verdun pour toujours. Installé à Gondrecourt et Delouze, il est en pleine manœuvre, sous le froid et la neige. Le 16 janvier 1917, il atteint en train Clermont-sur-Oise, puis part en camions le 23 pour Beauvais. Les manœuvres continuent jusqu’au 12 février, date à laquelle le régiment monte dans le secteur de Daucourt, devant Montdidier, dans la Somme. Une attaque française se prépare, alertant les Allemands qui deviennent nerveux, multipliant les coups de main afin d’obtenir des renseignements. Les Français font de même afin de savoir ce que savent les Allemands. Le 15 mars, une opération française arrive jusqu’à la 3e ligne allemande sans rencontrer de résistance. Les Allemands se replient. Le 16 au matin, l’avancée française commence, par Roye, Carrepui. La campagne est systématiquement ravagée. Les 18 et 19, Champien et Ham sont traversés. Les ponts sur le canal sont détruits, mais des passerelles improvisées permettent le passage des hommes.

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Le 21 mars, l’attaque d’Hartemps rencontre une forte résistance. Les Allemands ont inondé la vallée et les tirs de barrage sont nourris. Son artillerie est très active. Le village est enlevé le 23, de même que Séraucourt-le-Grand, Happencourt, puis Essigny-le-Grand le 25.

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Joseph Claude y est blessé par éclat d’obus (plaie pénétrante dans la région molaire gauche et à la région antérieure du pied droit). Nous ne savons pas pendant combien de temps il a été évacué. De toute façon, le 30e RI n’ira pas plus loin. Trop éprouvé, il est relevé et employé à des travaux de réfection. Jusqu’au 8 avril 1917, il est soumis à des travaux fatigants d’équipement offensif, et à des déplacement multiples. Il est mis au repos et se déplace progressivement jusque sur Noyon. De là, le 6 mai 1917, sous une chaleur accablante, il est transporté en camions sur le chemin des Dames où l’ennemi tente des attaques violentes. Il atteint Perles et monte en ligne le 9 en face de Cerny.

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L’ordre y est formel, tenir coûte que coûte. On tiendra un long mois, attaquant ou attaqué constamment, sans dormir — presque sans manger et sans boire, pêle-mêle avec des cadavres et soumis d’une façon continue au bombardement par obus et engins de tranchée le plus effrayant que le Régiment ait jamais subi. Le 10 juin au matin, l’infanterie ennemie, en force et bénéficiant d’un effet de surprise, réussit, malgré les pertes qu’elle subit, à pénétrer dans nos lignes. Un corps-à-corps sanglant s’en suit, qui dure jusqu’à l’arrivée des 7e et 11e Compagnies qui, par leur énergique intervention à la grenade, rétablissent intégralement notre ligne. Deux autres tentatives aussi violentes, qui se produisent les 20 et 22 mai, sont vouées au même échec, et à chaque déconvenue le Boche se venge en intensifiant ses bombardements, multipliant ses engins de tranchée, rendant le séjour dans nos lignes intenable. Ceux-là seuls qui étaient là peuvent dire quelle somme de courage et d’abnégation y fut dépensée, et ceux-là ont gardé, ineffaçablement gravé dans le cœur, le souvenir des journées passées dans cet enfer. Le 23 juin, c’est une longue théorie de spectres qui descendent de Cerny et qui, embarqués le 24, vont goûter au camp de Remaugies le repos qui leur est accordé. (Historique du 30e Régiment d’Infanterie. Imprimerie Hérisson Frères – Annecy).
Le 15 juillet, il part pour tenir le secteur de Moy, en bordure de canal. Un bataillon tient les lignes, mais les Allemands sont si loin et a tant d’obstacles à franchir qu’il n’est pas bien gênant. Ils ne tentent qu’un seul raid. A partir du 10 août, le régiment est amené par étapes à Trosly-Breuil, où il inaugure le 14 une période d’entraînement physique et de manœuvres qui ne prendra fin que le 27 août. Rapproché à ce moment de sa base d’opérations, il vient à cette date cantonner dans les ruines de Tartiers et Bieuxy. A peine arrivé, il reprend son entraînement. Le 2 septembre, les officiers effectuent une reconnaissance dans le secteur du moulin de Laffaux. Il va donc participer à l’attaque de la Malmaison.
Du 2 septembre au 10 octobre 1917, les bataillons alternent pour préparer le terrain. Les unités cantonnent dans les creutes de Laffaux. Les Allemands tentent de nombreux coups de main afin de connaître les intentions françaises. Le 2e bataillon est parti sur l’arrière pour apprendre à manœuvrer avec les tanks pour la première fois. Après une période de repos, les bataillons remontent en ligne le 22 octobre. Après une intense canonnade, les hommes s’élancent le 23 à 5 h 15. Il fait nuit noire et il est difficile de se repérer dans ce terrain dévasté. Les gradés, boussole et montre en main, essaient de rallier leurs hommes, se plaquant régulièrement au sol en raison des rafales de mitrailleuses allemandes.

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Le 1er bataillon enlève au lever du jour son objectif, le château de la Motte et ses creutes. Le 2e bataillon lui aussi enlève la vallée de la Guerbette, faisant 120 prisonniers. Ce n’est qu’à midi que le 3e bataillon, aidé par le second, enlève également son objectif, atteignant la ligne des cotes 156,6 à 103,2. Les pertes sont sévères car beaucoup d’abris allemands, malgré la préparation d’artillerie sont intacts. Il faut alors rapidement organiser le terrain.

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Le 25 octobre, le régiment se replie dans les creutes de Laffaux où il exécute des travaux de seconde ligne. Le 29, il part pour Clamecy, puis début novembre pour Dommiers et Saint-Pierre-Aigle. Il reçoit des mains du général Pétain la fourragère aux couleurs de la Croix de Guerre. En novembre, il est au repos dans la région de Pierrefonds, puis part le 2 décembre pour Tergnier où il exécute des travaux de seconde ligne. Il embarque ensuite à Babeuf pour le camp de Saint-Ouen où il passe la fin de l’année. Le 9 janvier, il embarque pour l’Alsace. Le 11 janvier, une centaine d’hommes chantent des chansons antimilitaristes outrageantes pour leurs officiers et une causerie antipatriotique (G PEDRONCINI Les mutineries de 1917 – PUF p 60). Nous ne savons pas quelles sanctions ont été prises. Débarqué à la Fontaine, il faut route pour relever un groupe de BCP dans le secteur de Schonholz le 16 au soir. Les Allemands y sont nerveux et il faut de plus lutter contre la boue qui s’insinue partout. Après deux attaques infructueuses, les Allemands procèdent à de nombreux tirs de destruction. Le 10 avril, le régiment est relevé et par Amiens où il reçoit quelques obus de 380, gagne Dunkerque puis Bergues. Il s’agit de défendre une chaîne de monts sur laquelle une attaque allemande est imminente. Transporté en camions anglais, le 30e RI arrive à Provein, puis dans la région du cabaret Ratkot. Tous les mouvements sont immédiatement repérés par les Allemands qui procèdent alors à des bombardements. Le 19, leur intensité interdit complètement la circulation sur les routes et les pistes. Dans la nuit du 23 au 24 octobre 1918, le régiment relève le 99e RI au Mont Kemmel. La journée du 24 se passe en préparatifs pour une opération visant à prendre le King’s Way. L’assaut débute à 21 h. Les prisonniers allemands annoncent alors qu’une attaque allemande est prévue pour le lendemain après une préparation par obus à gaz.

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A 2 h 15, la préparation allemande commence. Obus à gaz, explosifs de gros et petit calibre, ce ne sont que détonations, cris de blessés, lueurs d’éclatement déchirant l’air empesté. Trois longues heures de ce régime exaspérant et l’attaque d’infanterie se déclenche. Nos braves troupiers, à la vue des uniformes exécrés, reprennent toute leur belle assurance, et les mitrailleuses et fusils-mitrailleurs font rage. L’assaillant subit là des pertes effroyables, mais pour une section disparue dix autres réapparaissent. Ils sont trop et nous sommes trop peu, nous ne pourrons pas les empêcher d’entamer notre ligne. Une deuxième ligne de résistance se constitue en hâte, plus en arrière, au pied du Scherpenberg. Celle-là brisera les dernières tentatives adverses. L’ennemi voulait les monts, il n’a réussi qu’à prendre leur avancée du Kemmel, et encore n’a-t-il pu obtenir ce maigre résultat qu’au prix de 60 % de pertes. Le 27 au soir, dans une ferme près d’Abeele, le Lieutenant-Colonel SANTOS-COTTIN rassemblait près de son drapeau les glorieux restes du Régiment. Que de vides, hélas ! Nous avions laissé sur les pentes ravagées des monts 1.950 officiers et soldats. (Historique du 30e Régiment d’Infanterie. Imprimerie Hérisson Frères – Annecy). Joseph Claude fait partie des morts. Disparu le 25 avril, sa famille n’en a été informée que le 6 août. Son décès a été fixé au 25 avril par jugement déclaratif de décès rendu par le tribunal civil d’Ambert le 3 mars 1922. Son corps n’a pas été retrouvé. Il avait 21 ans.

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Une réflexion au sujet de « Joseph Claude COMMUNAL »

    Jules Marcel DICHAMP « Echandelys et la Grande Guerre a dit:
    3 avril 2017 à 18 h 35 min

    […] du Cluel mais expatrié avant la guerre dans la région d’Amiens et de Péronne ainsi que Joseph Claude COMMUNAL également du Cluel. Son nouveau régiment débute son entraînement au camp de Crévecoeur où il […]

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